"A son image" Jérôme Ferrari - éd Actes Sud

Antonia, 35 ans, meurt au détour d’un virage sur la route de l’Ostriconi, près d’Ile Rousse, en Haute Corse. Photographe rêvant de grands reportages de guerre, elle s’était rendue plusieurs fois dans les Balkans en 1991, elle avait aussi couvert les luttes sanglantes entre clans nationalistes sur l’île au milieu des années 80. En 1997, Antonia avait quitté définitivement la rédaction du journal régional qui l’employait pour ouvrir un magasin de photos dans son village natal près d’Ajaccio, tirant un trait définitif sur ses ambitions de grand reporter. C’est son parrain, prêtre sur le continent, qui célèbre l’office funèbre et qui pour faire rempart à sa détresse choisit de s’en tenir aux règles strictes de la liturgie. Mais dans la fournaise de la petite église, déferlent les images reconstituant la trajectoire de la jeune femme. Antonia, née en 1964, incarne une jeunesse corse des années 80, qui entretient le culte des héros nationalistes et s’enflamme pour les luttes intestines qui gangrènent les clans, emportant dans les règlements de compte armés les amis d’enfance. Antonia s’interroge sur ce qui vaut la peine d’être vécu et défendu, sur la légitimité de la violence dans les guerres. Et c’est aussi pour aborder d’autres causes plus « sérieuses » qu’elle part seule en ex-Yougoslavie se frotter à « la vraie guerre ». Elle pense alors que la photographie peut permettre de comprendre le réel saisi sur l’instant, qu’elle est indispensable au témoignage et à l’engagement. Mais après des années de questionnement « elle craint une fois de plus de produire une image mensongère suggérant une profondeur saturée d’un sens qui n’existe pas ». Jérôme Ferrari creuse les thèmes de la foi et de l’action, le sen des représentations, picturales, photographiques, bibliques et l’intégrité de celui qui saisi sur le vif la torture ou la mort dans l’espoir de donner à voir et à réfléchir. Faillite de l’image qui selon lui, donne l’illusion de comprendre l’histoire mais qui n’est peut-être qu’un moyen de satisfaire l’envie personnelle de donner une forme à l’abjecte, en ayant l’illusion de servir une cause. Jérôme Ferrari creuse dans ce qui constitue nos croyances, nous défiant d’en trouver une justification sincère. Etude exigeante des consciences qui établit un dialogue permanent avec le lecteur.

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Jeudi 25 avril 

 leconvoi

Rencontre avec Beata Umubyeyi Mairesse

Le 18 juin 1994, quelques semaines avant la fin du génocide des Tutsi au Rwanda, Beata Umubyeyi Mairesse, alors adolescente, a eu la vie sauve grâce à un convoi humanitaire suisse.Treize ans après, elle entre en contact avec l'équipe de la BBC qui a filmé et photographié ce convoi. Commence alors une enquête acharnée (entre le Rwanda, le Royaume-Uni, la Suisse, la France, l'Italie et l'Afrique du Sud) pour recomposer les événements auprès des témoins encore vivants : rescapés, humanitaires, journalistes. Nourri de réflexions sur l'acte de témoigner et la valeur des traces, "Le convoi" offre une contribution essentielle à la réappropriation et à la transmission de cette mémoire collective.

Lieu : 19h, Bibliothèque Benoîte Groult. Réservation conseillée

 

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