1951, la guerre de Corée a débuté depuis un an. Marcus Messner, dont les deux cousins sont morts au front, vit chez ses parents à Newark dans le New Jersey. Très bon élève et fils exemplaire, il aide son père dans la boucherie kasher familiale depuis son plus jeune âge. Destiné à poursuivre ses études à la petite université locale de Robert Treat, le brusque changement de caractère de son père va l'amener à partir loin de chez lui.
Atteint de subites bouffées paranoïaques, le père surveille son fils sans relâche et s'inquiète sans cesse sans raison. Marcus décide de quitter le foyer famililal, il part pour l'Ohio et s'inscrit à l'université de Winesburg. Dans cet Etat traditionaliste, les coutumes et les tabous règnent en maîtres. Ne parvenant pas à s'entendre avec ses colocataires, refusant d'intégrer une fraternité, il déménage à deux reprises et s'installe finalement dans une chambre seule, sous les toits. Cette inadaptation éveille les soupçons du doyen. Marcus fait la connaissance d'Olivia, jeune fille brillante et libérée qui va vite devenir une obsession pour lui.
C'est un roman sur l'Amérique puritaine des années 50, marquée par la guerre de Corée et les tabous. Marcus Messner, jeune homme intelligent et mûr, refuse de se soumettre à l'instinct grégaire des étudiants, à l'enseignement religieux imposé et à une éducation étouffante. En entrant à l'université, Marcus n'avait qu'un seul but, devenir major de sa promo pour obtenir son diplôme afin d'échapper à la guerre et à une mort certaine. Le personnage d'Olivia, à l'équilibre émotionnel fragile et à la réputation de fille facile, est la victime de cette Amérique puritaine. Le roman montre à quel point la plus infime des décisions peut avoir des conséquences déterminantes et irréversibles sur le cours des choses. Tous les personnages ont un relief particulier et une complexité ambivalente.
On retrouve dans ce roman les thèmes chers à Philip Roth : l'histoire moderne des Etats-Unis, la société américaine d'avant la révolution sexuelle et les relations filiales hautement problématiques. Il n'est apposé aucune morale, aucune conclusion édifiante au destin de Marcus dont l'existence bascule brutalement dans l'irrémédiable. C'est aussi dans ce choix que réside tout l'impact et l'émotion que produit ce court récit magistralement construit.